Un autre habitat est possible, avec des équipements durables, réparables et à l'impact écologique limité. La maison low-tech permet des économies, mais nécessite encore un investissement important en argent et en temps.

Loin des smart appartements connectés, bardés de capteurs et d’enceintes, on peut faire le choix d'équipements durables, facilement réparables et fonctionnant avec des énergies renouvelables, solaire en tête.

Entre les signes de plus en plus visibles du bouleversement climatique et l'augmentation du coût de l'énergie, les raisons de prendre le virage low-tech dans votre habitat ne manquent pas. Loin de se limiter aux achats, c'est une autre manière d'habiter…

Loin des smart appartements connectés, bardés de capteurs et d’enceintes, on peut faire le choix d’équipements durables, facilement réparables et fonctionnant avec des énergies renouvelables, solaire en tête.

Entre les signes de plus en plus visibles du bouleversement climatique et l’augmentation du coût de l’énergie, les raisons de prendre le virage low-tech1 dans votre habitat ne manquent pas. Loin de se limiter aux achats, c’est une autre manière d’habiter.

En plaçant un réfrigérateur au nord ou à l’extérieur, quand on en a un, et surtout en ne le branchant pas toute l’année, il est par exemple possible de réduire la consommation de l’équipement domestique le plus vorace en électricité. On peut le remplacer une bonne partie de l’année par un garde-manger, situé lui aussi au nord ou en extérieur (dans un jardin ou sur un rebord de fenêtre).

« Le garde-manger a vraiment été une découverte agréable, même si, en plein été, nous avons quand même eu besoin d’un petit réfrigérateur. Son utilisation oblige à interroger le lieu de conservation des aliments qui, pour beaucoup, n’ont pas besoin d’être au frais. C’est notamment le cas des œufs, mais aussi de la quasi-totalité des fruits et légumes. Elle est aussi accompagnée de la découverte d’autres modes de conservation des aliments comme la lactofermentation : la fermentation de légumes sans oxygène », explique Clément Chabot, ancien ingénieur et co-fondateur du Low-tech Lab, une association basée en Bretagne dont le but est d’expérimenter et diffuser des solutions pour vivre mieux avec moins.

Micromaison autonome

En 2019, Clément Chabot a participé à une expérimentation initiée par la structure bretonne, en partenariat avec l’Agence de la transition écologique (Ademe) : construire la première maison low-tech autonome en utilisant des techniques collectées notamment lors du Low-tech Tour de France effectué en 2017, et y habiter pendant six mois.

Une maison autonome est une maison capable de produire l’ensemble de ses ressources, sans être reliée à aucun réseau de distribution d’eau ou d’énergie. Avec son collègue Pierre-Alain Lévêque, ils ont donc habité à tour de rôle dans une micromaison de bois de 14 m2 (46 m3) agencée de manière optimale, avec deux mezzanines et des meubles rabattables.

L’objectif est de s’assurer que les techniques deviennent accessibles, mais aussi puissent être adaptées au quotidien sans sacrifier le confort

L’habitation est équipée de panneaux solaires pour chauffer l’eau, produire l’électricité nécessaire à l’éclairage, le rechargement des batteries de téléphone, d’ordinateur… Un chauffe-eau et un chauffe-air solaire sont installés. Pour compléter le chauffage quand l’ensoleillement manque, un poêle de masse. La cuisson des aliments est amorcée via une gazinière, puis poursuivie après ébullition sans utiliser plus d’énergie grâce à une marmite norvégienne – un caisson isotherme qui assure une cuisson lente.

L’eau de pluie est collectée, les toilettes sont sèches et une douche à recyclage est installée. Une fois l’utilisateur savonné et rincé, l’eau qu’il continue à utiliser est recyclée pour arroser des plantes ou laver l’extérieur.

« J’ai tellement apprécié habiter dans cette maison qu’avec ma compagne, nous vivons désormais depuis un an et demi dans une version 2 de la maison low-tech. Nous avons conservé tous ces équipements, à l’exception de la douche à recyclage qui nécessite un gros investissement technologique et n’a pas d’utilité dans un logement », précise Clément Chabot.

De cette expérimentation sont nés un rapport et une web-série. L’objectif est de s’assurer que les techniques recensées par l’association deviennent accessibles au plus grand nombre, économiquement, mais aussi puissent être adaptées au quotidien sans sacrifier le confort. Il s’agit aussi de donner des idées à d’autres. L’association bretonne a ainsi créé un annuaire collaboratif qui recense des entreprises et des associations engagées dans la démarche low-tech.

Côté cuisine, il existe différentes alternatives aux équipements de cuisson classiques. Le four solaire transforme l’énergie solaire en chaleur pour la cuisson. Il en existe différents modèles des plus perfectionnés, le cuiseur sous forme de tube, aux plus simples, pliables, en passant par le four solaire sous forme de boîte. Leur prix à l’achat va d’un peu moins de 100 euros à près de 1 000 pour des modèles très perfectionnés.

Autre possibilité, la marmite norvégienne évoquée plus haut. Cet ustensile millénaire, qui peut se présenter sous forme d’une grosse boîte en bois ou d’une housse isotherme, permet d’économiser jusqu’à 70 % d’énergie à la cuisson. Son prix varie d’un peu moins de 100 à 400 euros en fonction du modèle, de la taille, des matériaux utilisés, des conditions de production. Il est aussi possible de fabriquer soi-même sa marmite norvégienne pour un coût nettement plus faible.

Existe-t-il une machine à laver alternative ?

La machine à laver est un des équipements incontournables du logement, mais les alternatives low-tech grand public n’existent pas. La start-up canadienne Yirego a bien lancé Drumi, une mini machine à laver à pédale très compacte, qui permet de laver et sécher son linge en quelques minutes avec une faible consommation d’eau (de 12 à 24 litres) contre 40 litres pour un lave-linge petit modèle.

Cependant, ce lave-linge qui coûte 389 euros n’est pas commercialisé en France : il ne peut se commander que sur le site Internet de l’entreprise. Des tutoriels permettant de construire un lave-linge à pédale existent, mais il faut non seulement récupérer des pièces détachées (tambour de lave-linge, pédalier, chaînes de vélo…), mais aussi bricoler et pédaler pour faire sa lessive !

Mieux vaut aussi oublier le lave-vaisselle. « L’alternative low-tech au lave-vaisselle, c’est la vaisselle à la main », s’amuse Samuel Capelier, animateur et formateur à l’association savoyarde Oxalis, qui propose des formations à l’éco et auto-construction.

« C’est vrai qu’un lave-vaisselle consomme moins d’eau qu’une vaisselle à la main, mais la consommation d’eau n’est pas le seul impact écologique de la machine, il y a aussi celui de sa construction. »

Concernant l’ensemble du grand comme du petit électroménager, penser low-tech, c’est aussi privilégier des équipements durables. L’indice de réparabilité mis en place en 2021 permet de choisir un équipement dont les pièces sont aisément remplaçables.

« Acheter d’occasion permet aussi de réduire son impact écologique », insiste Guénolé Conrad, salarié du Low-tech Lab. Un appareil électroménager reconditionné, via notamment le réseau d’entreprises d’insertion Envie, bénéficie d’une garantie de deux ans.

Opter pour une maison low-tech, ce n’est pas simplement choisir des équipements low-tech, mais adopter une démarche globale

Côté petit électroménager, il est possible de s’équiper d’occasion dans les recycleries, voire d’apprendre à réparer soi-même dans les repair-cafés et autres associations. Une manière d’allier économies, écologie et autonomie.

Repenser le chauffage

Vivre dans une maison low-tech, c’est aussi repenser son mode de chauffage, en privilégiant des énergies renouvelables. Le solaire thermique permet ainsi d’alimenter des chauffe-eau comme des chauffe-air.

« Le principe est simple, ce n’est en réalité que des tuyaux derrière une vitre, explique Samuel Capelier. L’installation n’est pas très compliquée, mais elle nécessite quelques notions de plomberie », dit-il.

Son association propose à un public de bricoleurs avertis des stages de deux jours consacrés à l’auto-installation d’équipements solaires thermiques. Elle en réalise trois par an, réunissant à chaque fois une dizaine de participants. L’orientation des installations solaires, sur les façades et toitures sud, est primordiale.

Près de Toulouse, la société Boisurel propose des installations de chauffe-air solaire composé d’un panneau en verre trempé derrière lequel est posé un absorbeur en aluminium sur un support de liège, et d’un boîtier monté sur une gaine d’aération. Un panneau de 2 m2 suffit à chauffer 40 m2, en plein hiver. Faute d’ensoleillement suffisant, il est nécessaire de compléter avec un autre mode de chauffage.

Il faut compter 1 650 euros pour le matériel et entre 500 à 700 euros d’installation. « Nous pouvons livrer partout en France, mais la difficulté que nous rencontrons est le manque d’installateurs dans certaines régions (Alpes, Massif central, Nord) », regrette Antonin Soria, gérant de Boisurel.

Pas de dogmatisme, néanmoins, sur les sources énergétiques des équipements. Pas question, par exemple, de troquer un chauffe-eau au fuel qui fonctionne parfaitement contre un modèle solaire neuf. « Ce qui est low-tech, c’est alors de lui ajouter une jaquette isolante pour éviter la déperdition énergétique », précise François Courtois, fondateur d’Eclowtech, une petite Scop spécialiste des low-technologies. Le kit complet pour isoler un cumulus coûte moins de 50 euros.

Eclowtech est spécialiste d’une des techniques phares du low-tech, le poêle de masse, utilisé depuis des siècles dans les pays germaniques ainsi qu’en Europe de l’Est.

« Son principe est simple, les fumées circulent dans des briques avant de partir dans les conduits. Ces poêles de masse sont très adaptés au mode de vie de personnes qui partent travailler, car une seule flambée le matin suffit pour chauffer la maison toute la journée. En cas de grand froid, il peut être nécessaire d’en refaire une en fin d’après-midi. Autre avantage : ils consomment trois fois moins de combustibles qu’un poêle classique », argumente François Courtois.

Il faudra tout de même dépenser entre 10 000 et 15 000 euros pour un poêle de masse capable de chauffer une maison, et 6 000 euros pour un modèle plus petit adapté à une micromaison.

Pour proposer un poêle de masse adapté tant aux petits espaces qu’aux budgets serrés, des militants associatifs ont développé le Poelito, un poêle de masse en auto-construction. Semi-démontable, il est construit à partir d’un bidon de métal vide. Sa fabrication ne coûte que quelques centaines d’euros et différentes associations proposent des formations de montage de ces poêles dont les plus grands peuvent alimenter un chauffe-eau. Là encore, mieux vaut être bricoleur !

La sobriété partout où elle est possible

Opter pour une maison low-tech, ce n’est pas simplement choisir des équipements low-tech, mais adopter une démarche globale. Pas de cahier des charges préétabli : il s’agit de faire le choix de la sobriété partout où c’est possible.

« C’est se demander quel est le niveau de technologies nécessaire pour répondre à un besoin, au regard de son impact humain, écologique et social, et de la dépendance générée », explique Guénolé Conrad,

L’auto-construction est très valorisée dans la low-tech : elle permet de réduire largement les coûts, mais aussi d’être plus autonome

C’est aussi s’interroger sur son degré d’implication personnelle dans la démarche. « Quel temps, suis-je prêt à investir ? Est-ce que je souhaite une part d’auto-construction », ajoute-t-il. Celle-ci est très valorisée dans le mouvement low-tech, car elle permet de réduire largement les coûts, mais aussi d’être plus autonome. De nombreux tutoriels existent sur Internet, des plans sont disponibles en open source et des structures associatives proposent des stages payants.

Pour réduire l’impact écologique de la construction ou de la rénovation, le réemploi de matériaux de construction est à privilégier. Il est ainsi possible de se procurer des matériaux issus de démontage ou de déconstruction de bâtiments auprès d’entreprises ou d’associations. Une bonne affaire, tant du point de vue économique qu’écologique.

Il est également important de privilégier les matériaux qui ont les meilleures performances énergétiques (le bois, la brique, le béton cellulaire – aussi appelé siporex ou thermopierre –, le béton de chanvre).

Habiter low-tech suppose cependant de s’interroger sur l’opportunité de construire. « Ce qui est low-tech, c’est rénover », insiste Clément Gaillard, designer climatique. « Une rénovation aura toujours un impact écologique moins important qu’une construction ! », renchérit Guénolé Conrad.

QOSHE - Maison low-tech : la sobriété à notre porte - Mélanie Mermoz
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Maison low-tech : la sobriété à notre porte

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24.02.2024

Un autre habitat est possible, avec des équipements durables, réparables et à l'impact écologique limité. La maison low-tech permet des économies, mais nécessite encore un investissement important en argent et en temps.

Loin des smart appartements connectés, bardés de capteurs et d’enceintes, on peut faire le choix d'équipements durables, facilement réparables et fonctionnant avec des énergies renouvelables, solaire en tête.

Entre les signes de plus en plus visibles du bouleversement climatique et l'augmentation du coût de l'énergie, les raisons de prendre le virage low-tech dans votre habitat ne manquent pas. Loin de se limiter aux achats, c'est une autre manière d'habiter…

Loin des smart appartements connectés, bardés de capteurs et d’enceintes, on peut faire le choix d’équipements durables, facilement réparables et fonctionnant avec des énergies renouvelables, solaire en tête.

Entre les signes de plus en plus visibles du bouleversement climatique et l’augmentation du coût de l’énergie, les raisons de prendre le virage low-tech1 dans votre habitat ne manquent pas. Loin de se limiter aux achats, c’est une autre manière d’habiter.

En plaçant un réfrigérateur au nord ou à l’extérieur, quand on en a un, et surtout en ne le branchant pas toute l’année, il est par exemple possible de réduire la consommation de l’équipement domestique le plus vorace en électricité. On peut le remplacer une bonne partie de l’année par un garde-manger, situé lui aussi au nord ou en extérieur (dans un jardin ou sur un rebord de fenêtre).

« Le garde-manger a vraiment été une découverte agréable, même si, en plein été, nous avons quand même eu besoin d’un petit réfrigérateur. Son utilisation oblige à interroger le lieu de conservation des aliments qui, pour beaucoup, n’ont pas besoin d’être au frais. C’est notamment le cas des œufs, mais aussi de la quasi-totalité des fruits et légumes. Elle est aussi accompagnée de la découverte d’autres modes de conservation des aliments comme la lactofermentation : la fermentation de légumes sans oxygène », explique Clément Chabot, ancien ingénieur et co-fondateur du Low-tech Lab, une association basée en Bretagne dont le but est d’expérimenter et diffuser des solutions pour vivre mieux avec moins.

Micromaison autonome

En 2019, Clément Chabot a participé à une expérimentation initiée par la structure bretonne, en partenariat avec l’Agence de la transition écologique (Ademe) : construire la première maison low-tech autonome en utilisant des techniques collectées notamment lors du Low-tech Tour de France effectué en 2017, et y habiter pendant six mois.

Une maison autonome est une maison capable de produire l’ensemble de ses ressources, sans être reliée à aucun réseau de distribution d’eau ou d’énergie. Avec son collègue Pierre-Alain Lévêque, ils ont donc habité à tour de rôle dans une micromaison de bois de 14 m2 (46 m3) agencée de manière optimale, avec deux mezzanines et des meubles rabattables.

L’objectif est de s’assurer que les techniques deviennent accessibles, mais aussi puissent être adaptées au quotidien sans sacrifier le confort

L’habitation est équipée de panneaux solaires pour chauffer l’eau, produire l’électricité nécessaire à l’éclairage, le rechargement des........

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