C’est peu dire que j’attends l’été, en cette fin avril – et pas seulement parce que j’ai rangé mes fringues d’hiver alors qu’il fait dix degrés. On sent Paris qui bruisse, prépare pour les JO ses plus beaux atours. On nous a sucré un mois de Foire du Trône, les pelouses étant réquisitionnées. Les enfants boudent, mais est-ce qu’on dérange une belle femme qui se pomponne pour recevoir ?

Ce qui est drôle, c’est que cette belle femme-là n’a pour se maquiller que des pinceaux sales, ses bas de soie sont filés, elle pue un peu du bec mais vit dans l’espoir que le sens du vent soit à son avantage.

D’ailleurs, si le peuple gris autour pouvait s’effacer un peu ? Rendez-vous sur le site anticiperlesjeux.gouv, où les locaux piocheront des astuces pour se faire le plus discrets possible durant ce mois de ferveur. On se passerait bien des Parisiens excédés au moment inéluctable où les transports en commun se mettront à fonctionner encore moins qu’en temps normal.

La chronique du temps présent d'Emma Becker : "Nos plus belles années" dans un lycée huppé comme Stanislas

L’idée, c’est d’imputer les avanies à l’afflux soudain et massif de voyageurs ; d’habitude, vraiment, ça marche du feu de Dieu ! Que les fauteuils roulants du cru restent sagement chez eux ; cette année, c’est au tour des invalides exotiques d’attendre avec les yeux mouillés qu’on les porte jusqu’à la surface, si tant est que leur ticket de métro à quatre euros ne se soit pas démagnétisé par l’intervention du Saint-esprit. Photo Stéphanie Para.
Mais avant cela, il y aura la baignade d’Anne Hidalgo dans la Seine, pour montrer l’exemple. Ô liesse ! On ignore si c’est par pur cynisme, ou par cette étrange prescience qui parfois bénit les artistes, que sortira bientôt sur Netflix un thriller appelé Sous la Seine, où la présence d’un requin égaré dans le fleuve ternit notablement un championnat de natation.

Drôle d’augure, pendant qu’hôteliers et propriétaires s’inquiètent du peu d’engouement du public : moins de 50 % des réservations attendues ont été effectuées, idem pour les places à 8.500 euros pour la cérémonie d’ouverture, mais ici les organisateurs optimistes misent sur des achats de dernière minute.

On espère que le même enthousiasme écoulera les stocks de mascottes en peluche, qui patientent dans les allées des supermarchés, tel une armée de clitoris déprimés.

Tout ça commence à sentir la boum fiasco, où la boule à facettes tourne dans une salle à demi vide ; si en plus le Moulin Rouge s’y met… ! Peut-on imaginer présage plus comminatoire que cette hélice hautement symbolique échouée sur le trottoir ?

Devant ces boulons qui sautent les uns après les autres, on pense à Paris (et à sa maire) comme à une coquette galérant sur des talons beaucoup trop hauts, et ça n’était pas faute de l’avoir prévenue, la fête risque d’être pour elle très longue.

Emma Becker

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La chronique du temps présent d'Emma Becker : "Les JO à Paris, ça commence à sentir la boum...

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28.04.2024

C’est peu dire que j’attends l’été, en cette fin avril – et pas seulement parce que j’ai rangé mes fringues d’hiver alors qu’il fait dix degrés. On sent Paris qui bruisse, prépare pour les JO ses plus beaux atours. On nous a sucré un mois de Foire du Trône, les pelouses étant réquisitionnées. Les enfants boudent, mais est-ce qu’on dérange une belle femme qui se pomponne pour recevoir ?

Ce qui est drôle, c’est que cette belle femme-là n’a pour se maquiller que des pinceaux sales, ses bas de soie sont filés, elle pue un peu du bec mais vit dans l’espoir que le sens du vent soit à son avantage.

D’ailleurs, si le peuple gris autour pouvait s’effacer un peu ? Rendez-vous sur le site anticiperlesjeux.gouv, où les........

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