Sans doute le Président Macron n’a-t-il pas le temps de lire la Montagne le dimanche, ce qui expliquerait que j’attende toujours mon Ministère. Voilà deux semaines que je ne vis plus ; on déplace les ministres comme dans un jeu de Monopoly dément mené par mon fils de deux ans, les dés ne sont même pas lancés qu’il faut s’interrompre, le gosse ne veut plus du chapeau pour pion, la voiture est mieux, en fait non, la godasse, non, le chien.

Facile à dire, je sais. C’est un métier, mine de rien, composer un gouvernement ; il faut des gens sérieux, pas une horde éclatée de poulets sans tête dont la devise serait vas-y, fais un truc, dis quelque chose, on nous regarde.

"Ce n’est rien de moins qu’un prophète, qu’il nous faut. Une âme noble, qui s’oublierait dans la nécessité de redonner sa grandeur à la France".

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Un peu tard pour Jésus ou Abraham, et Raël, avec sa série qui sort sur Netflix, a autre chose à faire. Cet aveuglement qui nous empêche de renifler les grands hommes tant qu’ils ne meurent pas en martyrs expliquerait que nous ayons tous ri, au début des années 80, du dernier visionnaire de notre temps.

Lorsque mon Spotify en aléatoire m’a proposé, le weekend dernier, Si j’étais Président, de Gérard Lenorman, j’ai été saisie par sa dimension messianique, incapable de passer à la chanson suivante -et pas parce que j’étais en train de conduire ! Bon sang mais c’est bien sûr, ai-je immédiatement pensé.

Mickey premier ministre, Simplet à la culture, Tintin à la police, Picsou aux finances, Bécassine au commerce -cela peut sembler contre-intuitif, mais dans les textes saints, tout est symbole, tout est transposition

Par exemple, lorsqu’il dit « Coluche à la rigolade » (le verset exact m’échappe) -là encore, c’est raté, mais Dieu merci, il nous reste Hanouna. « On s’éclaterait vraiment, si j’étais président » retranscrit la vision d’un âge d’or à venir, et un chœur de séraphins, accompagnés des fifres célestes, approuve les saintes paroles : « on pourrait rigoler et chahuter sans risques / ce serait le beau temps, si t’étais président ». C’est vrai que la mention de « fontaines » dont « coulerait de l’orangeade » remet au cœur du croyant et du patriote l’espoir de jours de paix et d’abondance.

La chronique du temps présent d'Emma Becker : "On en reprend pour un an" (janvier 2024)

Hélas, quelques lignes plus bas, c’est la douche froide : « Je s’rai jamais président de la République ». On pourrait croire que Gérard, renonçant humblement à cette charge venue du monde des hommes, a oublié le ministère de la jeunesse, à qui appartient l’avenir. Mais de cette dernière sagesse sibylline et christique, « pas besoin d’être président, pour aimer les enfants », l’exégète immédiatement comprend que Benoît Jacquot est appelé à servir son pays.

Emma Becker

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La chronique du temps présent d'Emma Becker : "Si j'étais président"

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11.02.2024

Sans doute le Président Macron n’a-t-il pas le temps de lire la Montagne le dimanche, ce qui expliquerait que j’attende toujours mon Ministère. Voilà deux semaines que je ne vis plus ; on déplace les ministres comme dans un jeu de Monopoly dément mené par mon fils de deux ans, les dés ne sont même pas lancés qu’il faut s’interrompre, le gosse ne veut plus du chapeau pour pion, la voiture est mieux, en fait non, la godasse, non, le chien.

Facile à dire, je sais. C’est un métier, mine de rien, composer un gouvernement ; il faut des gens sérieux, pas une horde éclatée de poulets sans tête dont la devise serait vas-y, fais un truc, dis quelque chose, on nous regarde.

"Ce n’est rien de moins qu’un prophète,........

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