En réponse à la lettre de l’Association des microbrasseries1 parue dans la section Dialogue le 9 avril dernier.

Des discussions médiatiques et politiques ont eu lieu récemment sur l’avantage de maintenir l’exigence de longue date du marquage obligatoire pour les boissons alcooliques destinées à la consommation sur place. À écouter certains intervenants de l’industrie, on pourrait croire que le marquage ne serait plus nécessaire et que le timbre serait un outil archaïque, dépassé, et sans utilité.

À titre d’association qui représente des brasseries produisant plus de 90 % de la bière consommée sur place dans les bars et restaurants du Québec, nous sentons l’importance de rectifier certains faits.

D’abord, le marquage s’avère un rempart qui a fait ses preuves pour contrer l’alcool illicite et outiller les forces de l’ordre à combattre le crime organisé et l’économie souterraine.

Le timbre ou toute inscription avec la mention CSP (consommation sur place) permet à nos policiers et inspecteurs d’assurer une vigie efficace auprès des établissements qui pourraient être tentés d’acheter de l’alcool par le biais de réseaux non autorisés.

De plus, un contenant marqué offre aux brasseurs un moyen efficace de collaborer rapidement avec les autorités policières, fiscales et règlementaires afin d’identifier les volumes, la provenance et les caractéristiques des produits. D’ailleurs, les corps policiers et règlementaires ont tous unanimement exprimé leur appui au maintien du timbre.

Ensuite, le marquage assure un rôle de traçabilité de la chaîne d’approvisionnement autant utile aux fabricants qu’aux établissements licenciés ainsi qu’aux autorités fiscales, règlementaires et de santé publique. La provenance garantie (de la ferme à la table) des produits alimentaires est devenue de plus en plus importante pour les consommateurs québécois. En plus de fournir une preuve visible et tangible du paiement de la taxe, sa présence garantit que le produit est authentique et provient d’un fabricant autorisé. Compte tenu de l’augmentation exponentielle des ventes de boissons alcooliques incluses dans les repas à emporter, l’importance pour les clients de reconnaître facilement la légitimité de ces produits est plus pertinente aujourd’hui que jamais.

Finalement, le maintien du système de marquage protège et reconnaît les importants investissements historiques que les brasseurs québécois ont effectué aux cours des décennies afin d’adapter leur système de distribution à l’obligation du marquage. L’abolition du timbre pourrait déstabiliser le système de distribution de bière actuellement en place, mettant en péril les nombreux emplois syndiqués qui s’y rattachent.

Il convient également de rappeler qu’en 2023, des allègements ont été apporté par le gouvernement du Québec afin de répondre aux préoccupations des brasseurs artisans. Cette modification règlementaire a du même coup reconnu l’importance du système actuel tout en répondant aux demandes de certaines microbrasseries.

Il peut être tentant de se référer à l’absence du marquage dans d’autres provinces canadiennes comme argument pour son abolition. Toutefois, il faut rappeler que les structures de vente et de distribution de la bière ailleurs au Canada sont totalement différentes de la réalité québécoise.

Certains ont suggéré que le marquage pourrait être remplacé par le module d’enregistrement des ventes (MEV). S’il est vrai que le MEV offre des avantages en termes de transparence et de lutte contre la fraude fiscale, il est toutefois peu efficace pour contrer plusieurs autres types de criminalité et engendrera des coûts administratifs considérables pour les corps policiers appelés à s’adjoindre l’aide d’une légion d’analystes financiers. On ne parle donc plus d’allégement administratif.

L’Association des brasseurs du Québec et ses brasseries membres sont en faveur du maintien d’un système de marquage, mais demeurent ouverts à l’adoption d’une technologie plus avancée en remplacement du timbre.

Que ce soit la mention sur les étiquettes ou une inscription à jet d’encre, il existe une panoplie de solutions de rechange reconnues par les autorités du Québec afin de marquer la bière pour la consommation sur place.

Abolir le marquage sans prendre le temps d’en mesurer les nombreuses conséquences pourrait être très coûteux pour le Québec.

QOSHE - Le marquage des produits alcooliques doit être maintenu - Philippe Roy
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Le marquage des produits alcooliques doit être maintenu

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16.04.2024

En réponse à la lettre de l’Association des microbrasseries1 parue dans la section Dialogue le 9 avril dernier.

Des discussions médiatiques et politiques ont eu lieu récemment sur l’avantage de maintenir l’exigence de longue date du marquage obligatoire pour les boissons alcooliques destinées à la consommation sur place. À écouter certains intervenants de l’industrie, on pourrait croire que le marquage ne serait plus nécessaire et que le timbre serait un outil archaïque, dépassé, et sans utilité.

À titre d’association qui représente des brasseries produisant plus de 90 % de la bière consommée sur place dans les bars et restaurants du Québec, nous sentons l’importance de rectifier certains faits.

D’abord, le marquage s’avère un rempart qui a fait ses preuves pour contrer l’alcool illicite et outiller les forces de l’ordre à combattre le crime organisé et l’économie souterraine.

Le timbre ou toute inscription avec la mention CSP (consommation sur place) permet à nos policiers et inspecteurs d’assurer une vigie efficace auprès des établissements qui pourraient être........

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