Parce qu’elle a beaucoup évolué et qu’elle permet un fort impact, la fonction d’administrateur et d’administratrice d’entreprise est passionnante. Alors qu’elle s’est trouvée pendant trop longtemps réservée à un petit cercle de personnalités qui se renvoyaient des ascenseurs et maniaient habilement la cooptation, elle s’est ouverte à de nouveaux profils.

Logiquement, ces postes stratégiques suscitent de nombreuses vocations. C’est notamment le cas chez les femmes puisqu’en 2023 on recensait d’ores et déjà les 30% de représentation fixés dans les dispositions fédérales entrées en vigueur deux ans plus tôt. Si les grandes entreprises avaient cinq ans pour se mettre en conformité (au risque de devoir sinon fournir des explications), elles se sont rapidement adaptées et ont trouvé leur bonheur dans le vivier de talents féminins à disposition. En Suisse, mais aussi ailleurs dans le monde.

Plus modestes, les ambitions fixées à 20% dans les comités de direction sont aussi pratiquement atteintes. Ce taux cache toutefois des disparités préoccupantes puisque le prestigieux et convoité poste de direction générale (DG) se décline encore au masculin dans une écrasante majorité des sociétés cotées à la bourse suisse. Même si, depuis les arrivées remarquées de Hanneke Faber à la tête de Logitech et de Géraldine Picaud à celle de SGS, Suzanne Thoma, la directrice ad interim de Sulzer, se sent un peu moins seule au sommet de l’économie suisse.

La parité qui refléterait plus justement la composition de la population helvétique paraît donc encore très lointaine. Ce d’autant plus qu’un ralentissement des progrès est perçu et qu’un phénomène pernicieux semble s’être mis en route: de nombreuses femmes évitent en effet la case «DG» pour directement s’installer dans un fauteuil d’administratrice. Si elle se confirme, cette tendance est paradoxalement inquiétante parce qu’elle peut se révéler source de désillusions financières, voire de risque économique. A quelques exceptions notables, la fonction est moins rémunératrice qu’on ne le pense et le cumul des «cachets» peut poser de véritables problèmes d’indépendance et de disponibilité.

Un tel phénomène priverait surtout les grandes sociétés suisses de précieuses compétences exécutives. S’il ne faut pas jouer une fonction contre une autre, la féminisation des conseils d’administration ne doit en aucun cas se faire au détriment de celle des directions d’entreprise. Car c’est aussi à ces postes que se joue l’évolution des pratiques et du management.

QOSHE - Directrices générales, ne pas s’arrêter en route - Aline Bassin
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Directrices générales, ne pas s’arrêter en route

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01.05.2024

Parce qu’elle a beaucoup évolué et qu’elle permet un fort impact, la fonction d’administrateur et d’administratrice d’entreprise est passionnante. Alors qu’elle s’est trouvée pendant trop longtemps réservée à un petit cercle de personnalités qui se renvoyaient des ascenseurs et maniaient habilement la cooptation, elle s’est ouverte à de nouveaux profils.

Logiquement, ces postes stratégiques suscitent de nombreuses vocations. C’est notamment le cas chez les femmes puisqu’en 2023 on recensait d’ores et déjà les 30% de représentation fixés dans les dispositions fédérales entrées en vigueur deux ans plus tôt. Si les........

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