Il ne se passe pas un jour sans que la religion fasse parler d’elle. Et c’est souvent pour des faits dramatiques. Il faut dire que Dieu est un excellent prétexte pour justifier toutes sortes d’actes injustifiables, de la conquête d’un territoire à la négation d’autrui. Quoi de plus pratique que d’interpréter la volonté d’une figure si mystérieuse qu’on ne peut ni prouver ni réfuter son existence?

Pour des millions de gens pourtant, la religion représente bien autre chose qu’un déclencheur de soubresauts géopolitiques: elle est une clé vers eux-mêmes, l’espace dans lequel s’exprime leur désir de trouver un sens à leur existence. La discipline intérieure joue un rôle fondamental dans cette recherche métaphysique. Le calendrier juif est marqué par diverses périodes d’abstention; les pratiquants jeûnent lors de la fête du grand pardon (Yom Kippour) et évitent de consommer du levain lors de la Pâque qui commence cette année le 22 avril. Chez les chrétiens, le carême aussi est propice à des privations volontaires. Quant aux musulmans, ils fêtent entre mardi et mercredi soir l’Aïd el-Fitr, célébration qui marque la fin du ramadan.

Cette pratique permet aux croyants d’être reliés aux autres et à la transcendance (religare), mais aussi de relire les textes et de se recueillir (relegere), comme l’exprime la double interprétation du terme latin religio. Les rituels auxquels ils s’adonnent sont d’expressions différentes, ancrés dans des histoires et des cultures particulières. Pourtant, ils se rejoignent dans leur intention: permettre à l’être humain de faire une place en lui pour quelque chose qui le dépasse. Un élan dont témoignent aujourd’hui plusieurs jeunes musulmans de Suisse romande dans Le Temps, à travers leur récit du jeûne qu’ils viennent de traverser. Beaucoup retrouveront un peu d’eux-mêmes dans le combat qu’ils décrivent. Moins spectaculaire que ceux auxquels nous assistons à l’échelle de la planète, il n’en est pas moins, lui, porteur de sens.