«On comprend pas ce que tu dis, Isabelle!» C’est ce qu’un spectateur, au Théâtre de la ville de Paris, a lancé au cours d’une représentation de Bérénice d’après Racine (qui sera présentée l’automne prochain à la Comédie de Genève). Alexandre Demidoff a dit ici même le bonheur que ce spectacle lui avait procuré, où il a goûté voir Isabelle Huppert, seule en scène ou presque, revisiter à travers l’héroïne racinienne sa propre histoire de comédienne toujours avide de transgressions théâtrales. Aimé également la mise en scène de Romeo Castellucci, ce créateur d’images parfois sublimes destinées à creuser les silences d’un texte plutôt que ce qui y est dit, l’imaginaire d’une narration plutôt que son récit.

Mais ce spectacle aura rudement clivé. Spectateurs outrés de voir la tragédie de Racine réduite aux tirades de la reine délaissée. Incompréhension devant les radiateur, machine à laver, ballon de basket, autres accessoires tombés des cintres, alors que la voix d’Isabelle Huppert déformée par le vocodeur peine à faire entendre les alexandrins sublimes. «On ne voit rien et on entend mal. Que demander de plus?» a titré ironiquement le magazine Slate, résumant l’avis d’une frange de spectateurs furieux d’assister à une forme de mise à mort de l’intelligibilité comme du sens.

QOSHE - Gueuler au théâtre? - Jean-Jacques Roth
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Gueuler au théâtre?

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31.03.2024

«On comprend pas ce que tu dis, Isabelle!» C’est ce qu’un spectateur, au Théâtre de la ville de Paris, a lancé au cours d’une représentation de Bérénice d’après Racine (qui sera présentée l’automne prochain à la Comédie de Genève). Alexandre Demidoff a dit ici même le bonheur que ce spectacle lui avait........

© Le Temps


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