Depuis le feu vert du Conseil fédéral au mandat de négociations avec l’Union européenne, on n’entend pas tout le monde de la même manière. Les opposants se déchaînent. Contre le principe même d’un accord, pour les uns. Contre des points plus spécifiques, pour beaucoup d’autres. Et tout comme en 2021, ce sont eux, les Neinsager, qui donnent la note du débat. En multipliant les prises de position et en s’offrant des visuels à faire peur dans les chaumières: un méchant ogre d’un bleu européen qui délaisse un instant les enfants pour mieux dévorer la jolie petite Suisse rouge. Peu subtile mais efficace, la signature ordinaire de l’UDC.

Les nombreux sceptiques, ceux qui ne savent pas encore sur quel pied danser la nouvelle relation, ne mettent en avant que les points de désaccord. Clairement, on espère ici peser encore sur les négociations. Mais comme la marge de manœuvre s’avère ténue après une phase exploratoire particulièrement fouillée et transparente, les hésitants donnent surtout de l’eau au moulin très bien rythmé des opposants.

Les partisans, enfin, sont inaudibles ou quasi. Et quand on les entend, ils peinent à faire envie. A défaut de rêve, ils auraient pourtant un solide bilan à vendre. Car la voie bilatérale, qui se trouve à la base du partenariat entre Berne et Bruxelles depuis vingt-cinq ans, a offert à la Suisse une stabilité juridique exemplaire sur laquelle s’est épanoui le succès économique du pays.

Sans revitalisation de ce fertile terreau bilatéral, bien malin qui saura chiffrer l’érosion de la relation économique. Le coût de l’exclusion de la Suisse du programme de recherche Horizon Europe depuis 2021 en donne un minuscule avant-goût: près de 2 milliards de francs ont été investis en mesures transitoires.

La défense de nos intérêts économiques, culturels et scientifiques mériterait beaucoup plus d’audace de la part du Conseil fédéral et beaucoup moins d’atermoiements de la part des partis nationaux. Aux grands patrons comme aux PME de faire preuve de créativité, aux faîtières de l’économie de dégager des moyens à la hauteur des enjeux, sans tarder. Car à force de vouloir faire coïncider la communication et l’agenda, à force de se boucher le nez tant que les négociations ne sont pas bouclées, ils laissent la place aux anti-tout galvanisés. «Le statu quo est inacceptable», disent aujourd’hui les cantons. Si tous les autres ne trouvent pas le cran d’être aussi clairs, la Suisse prend le risque de répéter l’erreur de 2021.

QOSHE - Bilatérales III: faire envie, sans tarder - Nicole Lamon
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Bilatérales III: faire envie, sans tarder

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01.04.2024

Depuis le feu vert du Conseil fédéral au mandat de négociations avec l’Union européenne, on n’entend pas tout le monde de la même manière. Les opposants se déchaînent. Contre le principe même d’un accord, pour les uns. Contre des points plus spécifiques, pour beaucoup d’autres. Et tout comme en 2021, ce sont eux, les Neinsager, qui donnent la note du débat. En multipliant les prises de position et en s’offrant des visuels à faire peur dans les chaumières: un méchant ogre d’un bleu européen qui délaisse un instant les enfants pour mieux dévorer la jolie petite Suisse rouge. Peu subtile mais efficace, la........

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