C’est une gangrène qui ronge plusieurs Etats d’Amérique latine. La corruption et le crime organisé sont en train de dévaster des pays comme l’Equateur, le Honduras, le Salvador, le Mexique ou encore le Guatemala. Après les dictatures militaires qui s’étaient installées dans le continent, souvent avec l’aide des Etats-Unis, on avait pu s’enthousiasmer du printemps des peuples sud-américains. Aujourd’hui, l’incapacité des responsables politiques à prendre conscience des tragédies qui se déroulent devant leurs yeux et l’impunité presque totale qui y règne placent ces démocraties au bord de l’abîme.

Dans un contexte aussi délétère, l’arrivée à la tête du Guatemala de Bernardo Arévalo, qui s’exprime dans les colonnes du Temps, suscite bien des espoirs. Le nouveau président guatémaltèque a mis le pied à l’étrier en politique pour la première fois il y a 7 ans, à 58 ans. Le chef d’Etat, ex-diplomate, est familier des processus de paix, pour lesquels il a œuvré dans un organisme international genevois. Animé par la volonté de défendre la «chose publique» et le bien commun, il n’hésite pas à dire leurs quatre vérités aux mafias qui ont pris le Guatemala en otage. C’est courageux. Les défis qu’il devra relever sont gigantesques. Son ambition est de retourner aux fondamentaux de la politique. Le peuple se dit prêt à l’accompagner.

L’Amérique latine aurait besoin de nombreux Arévalo. L’Equateur a sombré dans une meurtrière guerre des gangs. Comme le Salvador, il a dû appliquer l’état d’urgence. Le Honduras connaît les mêmes problèmes. Au Mexique, le pouvoir politique a perdu tout contrôle. Au cours du dernier mandat du président Andrés Manuel Lopez Obrador, le pays a comptabilisé plus de 158 000 homicides intentionnels et plus de 40 000 disparitions. Plus au sud du continent, les pays andins sont aussi inquiets. Ils ont annoncé, lors de leur dernier sommet de Lima, la création du premier réseau andin de sécurité pour lutter contre l’explosion d’un narcotrafic ravageur.

Si, en Europe, on est focalisé sur l’avenir démocratique de l’Ukraine, on aurait tort de ne pas s’intéresser aux luttes des démocrates d’Amérique latine. Leur combat est notre combat. Défendre les principes démocratiques chez eux, c’est défendre les nôtres. Toutefois, la réponse à la déliquescence du politique face au crime organisé n’est pas le populisme de droite de l’Argentin Javier Milei, ni celui de gauche du Mexicain Lopez Obrador. La solution ne passe pas non plus par une émigration de masse vers des pays comme les Etats-Unis. Il est bien davantage question de rétablir un contrat social entre le pouvoir et le peuple. Pour la stabilité de ces pays, de la région et du continent.

QOSHE - Le combat des démocraties latino-américaines - Stéphane Bussard
menu_open
Columnists Actual . Favourites . Archive
We use cookies to provide some features and experiences in QOSHE

More information  .  Close
Aa Aa Aa
- A +

Le combat des démocraties latino-américaines

7 0
28.01.2024

C’est une gangrène qui ronge plusieurs Etats d’Amérique latine. La corruption et le crime organisé sont en train de dévaster des pays comme l’Equateur, le Honduras, le Salvador, le Mexique ou encore le Guatemala. Après les dictatures militaires qui s’étaient installées dans le continent, souvent avec l’aide des Etats-Unis, on avait pu s’enthousiasmer du printemps des peuples sud-américains. Aujourd’hui, l’incapacité des responsables politiques à prendre conscience des tragédies qui se déroulent devant leurs yeux et l’impunité presque totale qui y règne placent ces démocraties au bord de l’abîme.

Dans un contexte aussi délétère, l’arrivée à la tête du........

© Le Temps


Get it on Google Play