L’élégie d’Ovide ne nous le rappellera jamais assez… Exilé par l’empereur Auguste, loin de Rome et de sa muse – responsable, à l’en croire, de sa disgrâce à cause de l’Art d’aimer qu’il lui avait dédié –, le poète vivra l’enfer, reclus sur des terres hostiles. Il aura beau exagérer l’atrocité de ses conditions de vie dans son recueil de lettres, Tristes, récit de ses années d’exil entre 9 et 12 après J.-C. à Tomis, en Roumanie, ses souffrances seront terribles. Ravagé par l’angoisse, sans personne avec qui converser en latin, il perdra l’inspiration. « Le malheur a épuisé mon génie, écrit-il. [Ma veine] a péri desséchée par suite d’une longue inaction. » Désespéré, il rendra l’âme dans cette Scythie (actuel Iran) détestable. On le sait, depuis l’Antiquité, l’homme, cet « animal de la ville », comme le définit Aristote, n’est pas fait pour la solitude, qui sera associée pendant des siècles au malheur et à l’échec. « Être abandonné, discriminé, écarté, disqualifié, condamné à la solitude, c’est vivre une mort sociale » explique l’historienne Sabine Melchior-Bonnet, auteure d’une prodigieuse Histoire de la solitude.

QOSHE - Et si on avait besoin de la solitude, le plus vieux malheur du monde, pour s'accomplir ? - Audrey Lévy
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Et si on avait besoin de la solitude, le plus vieux malheur du monde, pour s'accomplir ?

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25.11.2023

L’élégie d’Ovide ne nous le rappellera jamais assez… Exilé par l’empereur Auguste, loin de Rome et de sa muse – responsable, à l’en croire, de sa disgrâce à cause de l’Art d’aimer qu’il lui avait dédié –, le poète vivra l’enfer, reclus sur des terres hostiles. Il aura beau........

© Marianne


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