Dimanche 10 mars – 17 h 30

Gueule de bois. Le FCSM ne gagne plus. Hier soir, encore une fois il a été rejoint alors qu’il menait 2/0 à la pause. Comme face au Red Star, il y a cinq semaines, comme face à Martigues, il y a 15 jours. Et lundi dernier, il a aussi craqué dans les dernières minutes, laissant la victoire à Rouen.

Cette fébrilité de fin de match, ce manque de caractère constaté par les dirigeants, les supporteurs mais aussi et surtout par l’entraîneur Oswald Tanchot et le directeur sportif Julien Cordonnier, lesquels ont – paraît-il – fait trembler les murs du vestiaire sochalien après le match face au Mans.

Ce samedi 9 mars, c’était la fête, et cette égalisation en a gâché un peu la saveur. La fête parce que c’était le match des « sociochaux ». Les joueurs portaient le fameux maillot sur lequel sont inscrits 9 800 noms qui ont accepté d’y figurer (sur les 11 000 socios ayant participé à la levée de fonds l’été dernier). Des sociochaux étaient venus de toute la France et parfois d’autres pays, arborant le même maillot. Une fête populaire que les joueurs auraient dû honorer jusqu’à la fin du match.

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Ne pas rester sur cette gueule de bois, donc. Il était prévu que cette chronique du mois de mars soit consacrée aux Sociochaux. Mais impossible de finir ce week-end avec le goût de ce match nul dans la bouche. J’ai donc contacté ce dimanche les Sociochaux que je pouvais avoir rapidement sous la main. Et nous devions nous voir en fin d’après-midi, avec Florian Pasqualini et Nicolas Diot, le communicant et l’informaticien. On n’imagine pas toutes les compétences que cette association a pu fédérer.

Le supportariat est un microcosme où on trouve de tout et notamment des communicants, des informaticiens, mais aussi des financiers, des juristes, des graphistes, et d’autres encore. Finalement Nicolas Diot ne pourra nous rejoindre dans ce bar-restaurant de la périphérie de Besançon. Je ne l’aurai qu’au téléphone le lendemain pour prolonger le très long échange avec Florian, autour d’une bonne bière. Florian, donc. Nous l’avions évoqué sans le nommer lors de notre chronique de février.

C’est lui qui avait passé ce fameux coup de fil à Jean-Claude Plessis depuis une plage corse, pour établir la jonction entre Sociochaux et FCSM 2028. Une boîte à idées infatigable, un amour de son territoire. Il a même co-écrit il y a une douzaine d’années un abécédaire historique sur le Pays de Montbéliard. Florian tient néanmoins au « Nous ». « Nous », les sociochaux tous ensemble.

Mais « nous » aussi, tous les acteurs qui ont permis de ne pas laisser chuter le FCSM dans le précipice cet été : les supporteurs actifs (dont la fameuse TNS qu’on appelle parfois « Ultra » pour faire peur aux enfants et à Pascal Praud), qui ont organisé le rassemblement du sursaut un certain 14 juillet ; le duo Plessis-Wantiez, catalyseur de toutes les énergies ; la quarantaine d’actionnaires locaux réunis au sein de FCSM 2028 ; les collectivités locales dont les deux chefs de file, Pays de Montbéliard Agglomération et le Département du Doubs, qui ont versé à temps chacun leur million pour permettre de passer devant la DNCG ; et les Sociochaux, évidemment, désormais représentés au conseil d’administration du club. Tous ces acteurs se sont fédérés, par peur de la mort du club de leur enfance, du club de leur vie.

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Il faut bien se rendre compte que c’est une première en France. Jamais un club professionnel n’avait fait une place à une association de socios dans son CA.

Ce « Nous » suscite des vocations dans tout le pays désormais. Il y a quelques mois, une rencontre a eu lieu avec des représentants de supporteurs d’autres clubs souhaitant imiter leurs congénères sochaliens. Comme Bastia, dont les Socios ont pris en main leur club alors que le club corse avait perdu son statut professionnel et avec lesquels l’ami Pasqualini (quand il est sur l’île, veuillez ne pas prononcer le « i » final) a noué évidemment quelques liens afin de s’inspirer le leur expérience, Sochaux peut faire école.

Alors oui, c’est compliqué de faire partie du conseil d’administration et d’être de facto associé aux responsabilités qui en découlent. Il faut trouver le bon curseur entre le secret des affaires et la transparence due aux 11 000 membres de cette association géante. Florian me confie que les relations sont extrêmement fluides entre cette dernière et Pierre Wantiez, un homme à la puissance de travail phénoménale.

Les Sociochaux, ce n’est pas seulement une place au conseil d’administration, ce sont aussi des projets. Le fameux maillot, dont il a été question plus haut. Une fierté légitime mais surtout un travail de titan récompensé par la vue du « grand-père, du père et de la petite-fille » arrivant chacun avec ladite tunique jaune sur le parvis du Stade Bonal samedi en début d’après-midi.

Comme Plessis, Florian met l’accent sur la transmission. Le deuxième projet marquant, ce sont les « billets suspendus », inspirés des cafés suspendus de Naples. Dans la cité napolitaine, lorsqu’on entre dans un bar, on peut acheter un café pour soi mais aussi un autre dont le ticket sera suspendu pour un inconnu qui n’aurait pas le moyen de se le payer. Sociochaux a permis cette expérience pour Sochaux-Le Mans. Chaque supporteur achetant sa place pouvait en acheter une autre qui serait destinée aux associations caritatives du coin. Et le duo Plessis-Wantiez, enchanté par l’initiative, a décidé que pour un billet suspendu acheté, le club en offrirait une autre. 1 400 places ont donc pu être offertes à un public qui n’a pas accès au stade d’habitude. Une expérience qui sera sans doute renouvelée à Bonal, et qui pourrait aussi faire école dans d’autres clubs français, espérons-le.

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Les Sociochaux ont encore d’autres idées et n’ont pas fini de nous étonner. Mais évoquons Nicolas Diot, ce bénévole exemplaire. Qui a passé des nuits blanches sur son ordinateur à organiser la levée de fonds, à combler par sa disponibilité une fracture numérique qui concerne aussi le monde des supporteurs. Qui a participé avec bien d’autres à placer tous ces noms sur un maillot afin que chacun puisse le trouver et être fier, qu’il soit habillé en XXL, en XL ou en S. Quelle aventure ! Quelle belle leçon de vie ! Ces bénévoles, à l’image de Nicolas Diot, constituent pour le club une ressource inépuisable de compétences sur laquelle le club peut parfois s’appuyer.

L’amour que portent Nicolas, Florian et tous les autres à leur club a créé ce petit miracle. Grâce à cet amour, le FC Sochaux est toujours debout. On a envie de dire aux joueurs : halte à cette fébrilité de fins de matches ! Imitez les Sociochaux qui ont oublié d’avoir peur et dont toutes les petites mains n’ont pas tremblé lors des moments décisifs en août dernier. Une montée directe en Ligue 2 semble aujourd’hui improbable après cette très mauvaise série. Il faut donc assurer le maintien du club en National, l’objectif initial pour cette saison. Cela passe par un bon résultat du côté d’Avranches vendredi prochain. Florian et Nicolas y croient. Ces gens ont la foi du charbonnier. Comment ne pas les aimer ?

Vendredi 15 mars – 21h30

Ouf ! Ce fut poussif mais cette fois c’est Sochaux qui a arraché une victoire dans les dernières secondes du match. Une forme de revanche sur tous ceux où les joueurs de Tanchot avaient eux-mêmes craqué sur le fil, à commencer par le match contre le Red Star début février, que l’on peut considérer comme le tournant de la saison sochalienne. C’est le tout jeune Martin Lecolier qui a inscrit le but vainqueur, lui qui est habitué aux matches de l’équipe réserve, belle récompense pour un joueur méritant et guerrier, qualités qui ont tant manqué à l’effectif ces dernières semaines. Un signe qui n’aura certainement pas échappé à Florian et Nicolas.

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David Desgouilles : "Ce que les Sociochaux ont à apprendre au foot français... et au monde"

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18.03.2024

Dimanche 10 mars – 17 h 30

Gueule de bois. Le FCSM ne gagne plus. Hier soir, encore une fois il a été rejoint alors qu’il menait 2/0 à la pause. Comme face au Red Star, il y a cinq semaines, comme face à Martigues, il y a 15 jours. Et lundi dernier, il a aussi craqué dans les dernières minutes, laissant la victoire à Rouen.

Cette fébrilité de fin de match, ce manque de caractère constaté par les dirigeants, les supporteurs mais aussi et surtout par l’entraîneur Oswald Tanchot et le directeur sportif Julien Cordonnier, lesquels ont – paraît-il – fait trembler les murs du vestiaire sochalien après le match face au Mans.

Ce samedi 9 mars, c’était la fête, et cette égalisation en a gâché un peu la saveur. La fête parce que c’était le match des « sociochaux ». Les joueurs portaient le fameux maillot sur lequel sont inscrits 9 800 noms qui ont accepté d’y figurer (sur les 11 000 socios ayant participé à la levée de fonds l’été dernier). Des sociochaux étaient venus de toute la France et parfois d’autres pays, arborant le même maillot. Une fête populaire que les joueurs auraient dû honorer jusqu’à la fin du match.

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Ne pas rester sur cette gueule de bois, donc. Il était prévu que cette chronique du mois de mars soit consacrée aux Sociochaux. Mais impossible de finir ce week-end avec le goût de ce match nul dans la bouche. J’ai donc contacté ce dimanche les Sociochaux que je pouvais avoir rapidement sous la main. Et nous devions nous voir en fin d’après-midi, avec Florian Pasqualini et Nicolas Diot, le communicant et l’informaticien. On n’imagine pas toutes les compétences que cette association a pu fédérer.

Le supportariat est un microcosme où on trouve de tout et notamment des communicants, des informaticiens, mais aussi des financiers, des juristes, des graphistes, et d’autres encore. Finalement Nicolas Diot ne pourra nous rejoindre dans ce bar-restaurant de la périphérie de Besançon. Je........

© Marianne


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