Haro sur les chômeurs ! La droite macroniste veut réduire à nouveau l’indemnisation du chômage. Décidément les petits soldats du Medef marchent au pas. Et comme d’habitude, en bons spécialistes de la mystification idéologique, ils déguisent l’intérêt particulier en intérêt général. Karl Marx, reviens. La lutte des classes est toujours là.

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Alors que le gouvernement refuse obstinément de taxer les superprofits, il sert la soupe au capitalisme. Le ressort de sa réforme est une conception finalement écœurante et irrespectueuse des chômeurs. Il s’agit de les rendre responsables de leur condition et de prétendre qu’ils se complaisent dans leur état. D’où l’idée qu’on doit les remettre au travail en réduisant leurs allocations. Baguette magique ? Quel mépris et quel cynisme !

Nos dirigeants croient-ils eux-mêmes à cette explication, aussi inhumaine que fausse, qui fait silence sur la vraie causalité du chômage en France ? Voilà bien une psychologie de bas étage, qui croit pouvoir s’autoriser de quelques cas particuliers pour généraliser un préjugé insultant, et faire payer à l’ensemble des chômeurs la difficulté de trouver un emploi. Non, il ne suffit pas de traverser la rue.

« La vraie droite nous gouverne, et elle fait son sale boulot de diffamation des chômeurs. »

D’où vient la destruction de l’emploi, sinon des délocalisations provoquées par la quête effrénée du travail à bas coût, qui aliène notre souveraineté économique et détruit notre modèle social ? Sous quelque habit qu’elle se présente, la vraie droite nous gouverne, et elle fait son sale boulot de diffamation des chômeurs. Il existe pourtant un terrible démenti concernant l’infamie qui s’invente des chômeurs heureux de l’être. C’est le taux de suicide des personnes qui subissent le chômage.

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Citons le quatrième rapport de l’Observatoire national du suicide, rendu public le mercredi 10 juin 2020. Les chiffres sont éloquents : 30 % des demandeurs d’emploi envisagent réellement de mettre fin à leurs jours, contre 19 % des salariés actifs jouissant d’un poste. Conclusion : « Le risque de décès par suicide des chômeurs est supérieur à celui des actifs en emploi, en particulier chez les hommes entre 25 et 49 ans. »

Rien d’étonnant à une telle désespérance si l’on dresse le bilan des conséquences provoquées par la perte d’emploi. Tous les registres de la vie sont touchés. Les conditions de vie matérielles sont abîmées. La vie familiale est bouleversée. Les diverses formes de relations sociales sont ébranlées. La santé tant morale que physique du chômeur est mise en cause. L’estime de soi tend à s’autodétruire. Les médecins ont à soigner, quand ils peuvent intervenir, les effets d’une alimentation désormais négligée, les troubles du sommeil, une désocialisation morbide, et une dérive dans des addictions dévastatrices.

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Michel Debout, coauteur du rapport cité concernant le suicide, appelle les pouvoirs publics à mettre en œuvre d’urgence une aide psychique aux demandeurs d’emploi. Ce n’est certainement pas en réduisant leurs allocations que l’on fournira cette aide.

Relisons la conclusion dramatique de l’enquête : « Le chômage entraîne une détérioration de la santé mentale pouvant aller de l’anxiété à la dépression, voire, dans sa forme la plus dramatique, au suicide. » Il est temps, plus que temps, de mettre un terme à cette politique de classe mortifère.

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Henri Peña-Ruiz : "Réduire encore l’indemnisation du chômage : une abjection"

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10.04.2024

Haro sur les chômeurs ! La droite macroniste veut réduire à nouveau l’indemnisation du chômage. Décidément les petits soldats du Medef marchent au pas. Et comme d’habitude, en bons spécialistes de la mystification idéologique, ils déguisent l’intérêt particulier en intérêt général. Karl Marx, reviens. La lutte des classes est toujours là.

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Alors que le gouvernement refuse obstinément de taxer les superprofits, il sert la soupe au capitalisme. Le ressort de sa réforme est une conception finalement écœurante et irrespectueuse des chômeurs. Il s’agit de les rendre responsables de leur condition et de prétendre qu’ils se complaisent dans leur état. D’où l’idée qu’on doit les remettre au travail en réduisant leurs allocations. Baguette magique ? Quel mépris et quel cynisme !

Nos dirigeants croient-ils eux-mêmes à........

© Marianne


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