« La valeur n’attend pas le nombre des années » disait Rodrigue dans Le Cid. Les louanges non plus, qui se sont abattues en déluge sur la tête du nouveau Premier ministre dès sa nomination officialisée. On aurait presque envie de lui confier l’organisation des JO tant il semble tout réussir.

C’est d’abord sa jeunesse et la rapidité de son ascension qui ont été vantées par beaucoup de ceux qui n’hésitent pas habituellement à prôner « le temps long » et l’importance de l’expérience en politique. Le nouveau Premier ministre s’est ainsi mué en « jeune prodige » (Le Temps, Europe 1) au « parcours fulgurant » (BFMTV), à « l’ascension éclair » (La Croix) voire « irrésistible » (Le Point). Des mots qui, on le confesse, ne sont pas sans rappeler notre propre titre : « Gabriel Attal, portrait-robot d'une bête de com’ à l'ascension fulgurante ».

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D’autres soulignent sa présence constante dans l’entourage du président depuis 2017 et le désignent comme un « poids lourd de la macronie » (Les Échos) ou un « macroniste modèle » (La Croix). Le Parisien revient de son côté sur « les cinq mois hyperactifs » de l’éphémère ministre de l’Éducation nationale. On semble vite oublier que Gabriel Attal n’a rien eu le temps de faire de notable compte tenu de ses très brefs passages aux différents ministères qui lui ont été confiées et que s’il est prodigieux, c’est surtout jusqu’ici dans les effets d’annonce.

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Beaucoup voient également en lui une « arme anti extrême-droite » comme Les ÉchosUne arme anti-Bardella ») ou La Tribune DimancheL’arme anti-RN de Macron »). On lui souhaite d'être plus efficace que les promesses du président sur le même thème en 2017.

Certains vont encore plus loin. Dans sa chronique pour le JDD, l’écrivain et chroniqueur Daniel Salvatore Schiffer voit en ce « fougueux mais brillant » Premier ministre « le nouvel ange Gabriel de la politique ». On espère ne pas être trop souvent à la place de Joseph.

Dans La Tribune Dimanche, le portrait qui lui est consacré évoque, « sur le papier », un « profil idoine pour mettre en œuvre le "réarmement civique" voulu par Emmanuel Macron en cette nouvelle année.» Quelques cours d'empathie et ce sera réglé.

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Dans Le Monde, la journaliste Solenn de Royer estime que cette nomination est « une petite "révolution", comme le titre du livre » publié par le président en 2016. Si elle est de la même teneur que celle du président, le mot « petite » est un peu faible. Elle ajoute : « Alors que ses derniers remaniements avaient été quasi unanimement jugés comme des pétards mouillés, aux effets techniques et politiques limités, l’amorce de celui-ci est déjà une rupture. » Si on osait, on dirait même que c’est « disruptif ».

C’est peut-être la conclusion de l’article de La Dépêche qui est la plus mesurée : « Lors du Campus de Renaissance à Bordeaux en octobre dernier, Gabriel Attal est la star du moment. Les députés sont dithyrambiques même ceux qui appartiennent à d’autres écuries comme ce proche du Bruno Le Maire qui nous assurait récemment : "Gabriel Attal pour moi c’est l'homme de l'année 2023. Je savais qu'il était bon mais un tel brio c'était au-delà de toute espérance" ». Étonnant d’ailleurs que personne n’ait encore pensé à lui ériger une statue.

Dans Le Figaro, le journaliste Michaël Sadoun s’interroge : « Ne s’enthousiasme-t-on pas un peu vite ? » Honnêtement, c’est à peine perceptible.

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"Nouvel ange Gabriel", "déjà une rupture" : Attal devient Premier ministre... et la presse devient dingo

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10.01.2024

« La valeur n’attend pas le nombre des années » disait Rodrigue dans Le Cid. Les louanges non plus, qui se sont abattues en déluge sur la tête du nouveau Premier ministre dès sa nomination officialisée. On aurait presque envie de lui confier l’organisation des JO tant il semble tout réussir.

C’est d’abord sa jeunesse et la rapidité de son ascension qui ont été vantées par beaucoup de ceux qui n’hésitent pas habituellement à prôner « le temps long » et l’importance de l’expérience en politique. Le nouveau Premier ministre s’est ainsi mué en « jeune prodige » (Le Temps, Europe 1) au « parcours fulgurant » (BFMTV), à « l’ascension éclair » (La Croix) voire « irrésistible » (Le Point). Des mots qui, on le confesse, ne sont pas sans rappeler notre propre titre : « Gabriel Attal, portrait-robot d'une bête de com’ à l'ascension fulgurante ».

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© Marianne


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