Temps de lecture: 5 min

Ho-ho-ho! Noël approche! Mais parce que les plateformes ont bien l'intention de ne pas laisser M6 et ses téléfilms avoir le monopole de la fiction de Noël, elles sont de plus en plus disposées à proposer des programmes en lien avec les fêtes de fin d'année.

En un film français et trois (voire quatre) américains, petit tour d'horizon de ce que Netflix et Prime Video nous proposent de nouveau en ce mois de décembre. Une compilation placée sous le signe de l'échange –de cadeaux, certes, mais aussi et surtout d'enveloppes corporelles. Rassurez-vous, ça n'a rien à voir avec un truc dégoûtant façon David Cronenberg.

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Le film français de cette sélection est aussi le plus étrange, pour ne pas dire frappadingue. Soit une histoire d'échange de corps entre, d'une part, un policier trop impliqué pour s'occuper de sa fille, et, d'autre part, le père de famille niais mais aimant du film de Noël qu'elle est en train de regarder. Le grand naïf joué par Éric Judor doit alors dénouer une dangereuse affaire de stups (d'où le titre) tandis que, à l'intérieur du poste de télé, le mastodonte campé par Ragnar Le Breton –pseudo qui vous donne une idée du personnage– est sommé de participer à un concours de patinage artistique.

Soit une version assez inattendue du film de «body swap», genre tellement à la mode qu'on en reparlera dans à peine deux paragraphes. Tout ne fonctionne pas dans Un stupéfiant Noël!, mais les bons moments sont légion, notamment grâce à des secondes rôles (Lison Daniel, Monsieur Poulpe, Alice Moitié) tous impeccables. Le scénario coécrit par le réalisateur Arthur Sanigou et Pierre Dudan (collaborateur habituel de Philippe Lacheau) va au bout de ses idées et de ses situations, et c'est très agréable.

Pour son premier long-métrage, Arthur Sanigou s'est amusé à singer l'esthétique des films de Noël des années 1990, ce qui rend Un stupéfiant Noël! particulièrement savoureux. Rares sont les réalisateurs français à avoir tenté le pari du «Christmas movie» avec un minimum d'ambition, si ce n'est Alain Chabat avec Santa & cie. On ne sait pas si celui-là fera date, mais on peut en tout cas tabler sur le fait que grâce à sa diffusion par Prime Video, il va séduire des spectateurs et spectatrices issus du monde entier, qui n'auront pas l'impression de voir une comédie franchouillarde, mais plutôt un sympathique délire à la Will Ferrell.

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Pas plus tard qu'il y a deux paragraphes, on vous promettait qu'on reparlerait de «body swap». Cet autre film de Noël 2023, propulsé par Netflix, propose lui aussi l'échange d'enveloppes corporelles, mais de façon nettement plus collégiale: imaginez ce qui se passe quand, dans une famille qui ne se comprend plus, le père devient le fils, la mère devient la fille, et le chien devient le bébé –et réciproquement.

Remake du Sens de la famille, comédie familiale française très sous-estimée (sans doute parce que jouée par Franck Dubosc), Family Switch en est en fait la version simplifiée –mais de Noël. Dans le film de Jean-Patrick Benes, des permutations successives avaient lieu, rendant l'ensemble plus complexe, et les situations horriblement (donc chouettement) dérangeantes se multipliaient; ici, la gêne est présente mais bien plus contenue, et le principe du «body swap» (dont on reparlera dans deux paragraphes, vous verrez) n'est pas poussé à son paroxysme.

Cela n'empêche pas ce film de fonctionner d'assez belle façon, grâce à un scénario ayant gardé un peu d'épaisseur malgré le dégraissage, mais aussi et surtout à un merveilleux casting. Vive Jennifer Garner, qui joue une ado-devenue-adulte pour la deuxième fois après 30 ans sinon rien. Vive Ed Helms, qu'on aurait tort de réduire à son rôle dans la trilogie Very bad trip. Et bravo aux ados Emma Myers et Brady Noon, également excellents, qui contribuent grandement à la réussite chaleureuse de l'ensemble.

Nous sommes en 2023, et Eddie Murphy continue à tourner dans des films indignes de la star qu'il était il y a une bonne trentaine d'années. Noël à Candy Cane Lane n'est pas la pire des ses productions –difficile de détrôner Appelez-moi Dave, dans lequel il joue un vaisseau spatial–, mais c'est tout de même bigrement poussif et fichtrement longuet. Et ce malgré une pincée de «body swap» (avouez que vous l'attendiez).

C'est l'histoire d'un type cherchant à tout prix à gagner un concours d'illuminations de Noël, qui se retrouve à signer un pacte faustien avec une elfe machiavélique. Il doit remplir ses engagements (lui apporter suffisamment d'anneaux dorés) sous peine de perdre son corps... et de se transformer en figurine de Noël –une sorte de santon à l'américaine, pour le dire autrement. Des enjeux dont on se contrefiche, traités avec de moins en moins d'inventivité au fur et à mesure des séquences.

Comme souvent chez le Murphy du XXIe siècle, tout est poussif, joué avec fadeur par les uns et excès par les autres, et pas aidé par des effets visuels assez calamiteux –on ne peut certes pas faire pire que ceux d'Appelez-moi Dave, mètre-étalon absolu dans tous les domaines. Ça donne envie de se nettoyer le cerveau et les yeux en revoyant Un fauteuil pour deux, l'un des sommets de la carrière d'Eddie Murphy, qui se déroulait à Noël et dans lequel il était question... de deux types qui n'échangent pas leurs corps, mais leurs vies.

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Au risque de vous décevoir, il n'est pas question de «body swap» dans cette dernière sélection, même si le thème principal de ce diptyque romantique est celui de l'échange. Dans Ton Noël ou le mien?, sorti fin 2022 sur Prime Video, l'étudiant incarné par Asa Butterfield (Otis dans Sex Education) décidait de monter in extremis dans le train de sa dulcinée (Cora Kirk) afin qu'elle lui présente sa famille pour Noël. Manque de bol: celle-ci avait la même idée au même moment, et chacun·e finissait par passer le réveillon en compagnie de sa belle-famille, mais sans l'être aimé.

D'obstacles en révélations, tout finissait pour le mieux, dans le plus chaleureux des esprits de Noël. Et rien ne semblait appeler un deuxième volet à voir le jour... sauf qu'un an après, voilà Ton Noël ou le mien 2, sans le point d'interrogation, ni le charme du premier film. Il faut dire que la situation originale du précédent, à savoir l'échange entre les deux réveillons, ne trouve pas ici d'équivalent: dans ce deuxième épisode, il s'agit simplement d'emmener les deux (belles-)familles aux sports d'hiver et d'observer ce qui se produit.

Or il ne se produit pas grand-chose: l'un des clans est exubérant, l'autre bien plus guindé, mais cela ne crée que quelques modestes étincelles. Ceux qui étaient des personnages secondaires dans Ton Noël ou le mien? auraient sans doute dû le rester. Certains sont sympathiques, mais ils n'ont globalement pas assez d'épaisseur pour prétendre se muer en protagonistes principaux de ce que le scénariste semble avoir conçu comme un film choral sur un vague fond de romance.

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Films de Noël 2023: sur Netflix et Prime Video, le «body swap» avant tout

9 0
17.12.2023

Temps de lecture: 5 min

Ho-ho-ho! Noël approche! Mais parce que les plateformes ont bien l'intention de ne pas laisser M6 et ses téléfilms avoir le monopole de la fiction de Noël, elles sont de plus en plus disposées à proposer des programmes en lien avec les fêtes de fin d'année.

En un film français et trois (voire quatre) américains, petit tour d'horizon de ce que Netflix et Prime Video nous proposent de nouveau en ce mois de décembre. Une compilation placée sous le signe de l'échange –de cadeaux, certes, mais aussi et surtout d'enveloppes corporelles. Rassurez-vous, ça n'a rien à voir avec un truc dégoûtant façon David Cronenberg.

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Soit une version assez inattendue du film de «body swap», genre tellement à la mode qu'on en reparlera dans à peine deux paragraphes. Tout ne fonctionne pas dans Un stupéfiant Noël!, mais les bons moments sont légion, notamment grâce à des secondes rôles (Lison Daniel, Monsieur Poulpe, Alice Moitié) tous impeccables. Le scénario coécrit par le réalisateur Arthur Sanigou et Pierre Dudan (collaborateur habituel de Philippe Lacheau) va au bout de ses idées et de........

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